Le travail de la science et le numérique – Données, publications, plateformes. Une analyse systémique de la loi pour une République numérique
Résumé
1. La loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique(LRN), entrée en vigueur le 9 octobre 2016, propose l’introduction de deux articles fondamentaux pour la recherche publique et l’avènement de la science ouverte :
– l’introduction dans le Code de la recherche d’un droit d’exploitation secondaire des publications scientifiques au profit des chercheurs (article 30) ;
– la création de deux nouvelles exceptions dans le Code de la propriété intellectuelle, au droit d’auteur et au droit du producteur de bases de données, autorisant le text and data mining (TDM) à des fins de recherche publique (article 38).
2. La définition précise du périmètre d’application de ces dispositions est nécessaire à la sécurisation des pratiques de partage de la science.
3. Dans cet objectif, la présente analyse systémique propose d’identifier les dispositions légales et réglementaires applicables aux trois concepts pivots de la science ouverte que sont les notions de « plateforme », « écrits scientifiques » et « données de la recherche », ainsi qu’aux relations entre ces concepts :
– « plateforme », « écrits scientifiques » et « données de la recherche » sont régis voir introduits par la loi pour une République numérique (article 30 et 38 ainsi que les articles 49 à 51), mais également par d’autres dispositions telles que le Code de la propriété intellectuelle, le décret constitutif du CNRS, le Code de la recherche ou encore le Code de l’éducation. Les obligations associées à ces concepts, comme l’obligation de loyauté des plateformes telle qu’affirmée par la LRN, sont également utilisés dans d’autres domaines du droit (principe de loyauté de la preuve ;
– les relations entre ces trois concepts forment également des régimes juridiques autonomes : open access, open data, informations scientifiques et techniques, open process ;
– le système global formé par ces concepts et relations devant aboutir à l’open science.
4. Cette analyse systémique permet de mettre au jour les écarts, les contradictions, les restrictions, les imprécisions aux fins de formuler des recommandations de sécurisation et d’encadrement :
– sécurisation des dispositions légales par décrets : au – delà de l’application de l’article 38 sur les conditions de mise en œuvre du text and data mining, il est proposé de préciser certaines expressions aux fins de limiter les divergences d’interprétation ;
– sécurisation des pratiques par un guide d’application et de bonnes pratiques à destination des chercheurs ainsi que par des sessions de formation et de sensibilisation ;
– encadrement des pratiques par l’établissement d’une charte éthique et d’un contrat type de publication scientifique ;
– supervision par une Agence de la Science ouverte garante des valeurs de la Science ouverte et porteuse des besoins de la recherche au niveau européen, notamment dans le cadre des discussions relatives à la proposition de directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique, ainsi qu’au niveau international, après d’instances comme l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture.